Ce guide a été préparé pour faciliter une lecture de l’œuvre dans les communautés du Carmel pour le 5° centenaire de la naissance de sainte Thérèse en 2015.
Au mois de février 1576 le Père Général, frère Jean-Baptiste Rubeo (Rossi) arrive dans la ville d’Avila. Et Thérèse s’arrange pour qu’il aille à Saint-Joseph afin qu’elle lui rende compte de sa vie et de sa récente fondation : « Il était charmé de notre manière de vivre, qui lui semblait une image — imparfaite sans doute — des commencements de notre Ordre, […]. Désireux de voir ces débuts prendre un large développement, il me donna de très amples patentes’, autorisant la fondation de nouveaux monastères » (F 2, 3) Un peu plus tard, considérant la nécessité qu’il y eut des frères de la même règle, la Madre en écrit au Père Général qui lui « envoya de cette ville l’autorisation de fonder deux couvents masculins, montrant par là combien il avait à cœur la perfection de l’Ordre » (F 2, 5)
Et c’est ainsi que commence l’aventure des fondations : Avila (V 32) ; Medina del Campo (F 3) ; Malagon (F 9) ; Valladolid (F 10) ; Duruelo (F 13-14) ; Tolède (F 15) ; Pastrana (F 17) ; Salamanque (F 18) ; Alba de Tormes (F 20) ; Ségovie (F 21) ; Beas (F 22) ; Séville (F 23) ; Caravaca –préparée, mais non réalisée par Thérèse –, (F 27) ; Villanueva de la Jara (F 28) ; Palencia (F 29), Soria (F 30) ; Grenade- réalisée par Anne de Jésus – et Burgos (F 31). C’est là l’itinéraire que Thérèse de Jésus va nous faire parcourir en nous tenant par la main.
Nous avons choisi comme guide pastoral pour cette année une lecture transversale qui en relie les éléments, en privilégiant les grands thèmes thérésiens :
- La vertu d’obéissance, qui l’amène à entreprendre la rédaction des Fondations.
- Le désir et la constance missionnaire pour le salut des âmes, racine et moteur de son œuvre.
- La pauvreté des premières communautés.
- Le discernement de l’oraison et de la vocation.
- L’importance de garder mémoire de nos origines et l’engagement d’être le fondement de ceux qui viendront.
- Quelques biographies exemplaires pour la mémoire collective.
- L’œuvre providentielle de Dieu qui est à l’origine et accompagne chaque fondation, et enfin,
- La perspective eschatologique : l’engagement de l’espérance toute tendue vers la vie. éternelle.
Bien que les textes-titre de chaque partie suivent l’ordre des fondations, la lecture est transversale, mais en essayant de renvoyer aux différents chapitres où apparaît la même thématique.
I « Mon expérience, […] m’a fait connaître les grands avantages que l’âme retire d’une pratique fidèle de l’obéissance. » (F prol. 1)
L’obéissance est une vertu à laquelle Thérèse se confesse « très dévote » (F 1, 3 ; 18, 13) Toute sa vie elle l’a cultivée et elle l’a inculquée à ses filles ; L’obéissance est médiation divine, stimulant et critère de discernement, forteresse et sûreté, disposition à l’union et “chemin vers le cielˮ.
A. Contexte
Le Christ a demandé à Thérèse « d’écrire la fondation de ces maisons » (R 9 ; 9/02/1570). Elle le fera trois années plus tard sur l’ordre de son confesseur (F Prol. 2 : LT 128, 5, au père Jérôme Gratien, du 5 octobre 1576). Elle commence donc à relater l’œuvre de Dieu dans les fondations de couvents de déchaussées et de déchaussés au service de l’Église, avec l’intention de traiter également de quelques choses sur l’oraison.
B. Clefs de lecture
- Racine : obéissance par amour, désir de contenter (F 5, 4-6.10 ; 6, 22)
- But : union à Dieu ou suprême perfection (F 5, 10-11.13)
- Modèle : Le Christ dans son incarnation et sa passion (F 5, 3.17)
- Le chemin de l’obéissance et ses médiations : confesseur, prieure, supérieurs (F 5, 12)
- Fruits : sécurité, maîtrise, paix force liberté, humilité, volonté fondée sur la raison, etc. (F Prol. 1-2 ; 4, 2 ; 5, 7.11-13)
- Obéissance et oraison : (F 5-8)
C. Célébration
Catéchèse : partant des fondements bibliques de l’obéissance du Christ et liste des bienfaits qui naissent de l’exercice de cette vertu. (F Prol. 1 ; F 5)
Débat : Comment vivons-nous l’obéissance aujourd’hui ? Quelles sont les difficultés que nous rencontrons pour reconnaître et accepter les médiations de la volonté de Dieu ?
II. « J’élevai des cris vers Notre-Seigneur, le suppliant de me fournir les moyens d’attirer quelques âmes à son service » (F 1, 7)
L’ardent désir de sauver des âmes et de faire progresser le prochain se transforme pour Thérèse en un engagement concret et total dans l’histoire, la société et l’Église de son temps. Dieu mène à leur plénitude les désirs qu’Il inspire : l’entreprise des fondations commence
A. Contexte
À Saint-Joseph d’Avila Thérèse reçoit la visite du frère Alonso Maldonado, missionnaire aux “Indesˮ. Les récits du franciscain avivent son désir du bien pour les âmes. Dieu entend sa prière : « Attends un peu, ma fille, et tu verras de grandes choses. » (F 1, 8).
B. Clefs de lecture
1. La dynamique du désir dans la vie spirituelle au service de l’Église : « Le repos leur devient impossible s’ils croient pouvoir contribuer quelque peu au bien d’une seule âme et à son progrès dans l’amour de Dieu » (F 5, 5 ; et 1, 6 ; 2, 3.4 ; 28, 15 ; 29, 3), chose que Dieu apprécie plus « que tous les services que nous pouvons lui rendre. » (F 1, 7 ; et 14, 8).
2. Providence divine et confiance dans les difficultés : « Mon courage cependant ne faiblissait pas : j’étais toujours pleine d’espoir que le Seigneur achèverait ce qu’il avait commencé. Déjà tout me paraissait très possible, et je me mis à l’œuvre. » (F 2, 6) « sa Majesté favorise toujours les désirs sincères et donne les moyens de les mettre à exécution. » (F 28, 23)
C. Célébration
Table ronde : Signes des temps et fidélité créative au charisme thérésien. L’espérance théologale embrasse les espérances terrestres, elle s’engage dans des réalisations concrètes, même si la réalité se montre contraire y oppose de la résistance : « Plus on connaît Dieu, plus on trouve aisées les œuvres qui regardent son service. » (F 3, 5)
Célébration pénitentielle : La collaboration de l’homme à l’œuvre de Dieu. Texte guide : « Ah ! mon tendre Maître, si ceux qui t’aiment n’accomplissent pas de grandes choses, la faute n’en est pas à toi, elle est à leur lâcheté, à leur pusillanimité ! » (F 2, 7 et 28, 18-19.43 ; 29, 3)
III. « Tant j’étais persuadée que le Seigneur ne manquerait pas à celles qui n’avaient d’autre souci que de lui plaire. » (F 1, 2)
La pauvreté est l’un des piliers de la réforme thérésienne ; Incisive et radicale dès la première fondation (V 35, 2-6 ; 36, 6.19-30), modérée au cours du temps et en présence de nouvelles circonstances : pauvreté absolue dans les villes grandes et assez riches, et avec une rente fixe dans les petits villages sans grandes ressources « Je tiens, en effet, à ce que les monastères soient ou entièrement pauvres, ou assez bien pourvus, pour que les sœurs ne soient pas obligées, en vue de subvenir à leurs besoins, d’ importuner qui que ce soit. » (F 9, 3 et 24, 17)
A. Contexte
Le décor : son expérience à l’Incarnation et la pauvreté comme retour aux origines, témoin de tout le renouveau dans l’Église. Thérèse évoque l’idéal de pauvreté vécu à Saint-Joseph d’Avila, la confiance en Dieu, la générosité et la solidarité des sœurs les unes pour les autres. L’exemplarité des premières communautés est le paradigme qu’elle veut voir perdurer dans la mémoire collective.
B. Clefs de lecture
1. Discernement et option pour le retour aux origines (V 35-36). Règles pour les nouvelles communautés (C 2).
2. Confiance dans la providence (F 20, 13 ; 27, 13-14 ; 31, 50).
3. Idéal vécu par les premières communautés de frères (F 14, 4-5) et les religieuses déchaussées (F 15, 13-15).
C. Célébration
Examen de conscience : en partant des dispositions théologales de pauvreté évangélique et leurs fruits : désir de pauvreté, détachement et confiance, maîtrise de soi, plénitude et quiétude (cf. F 15, 15)
Défi, engagement et prophétie : Comment vivre aujourd’hui la pauvreté évangélique dans nos familles, nos groupes, nos communautés, à la lumière des textes cités et face aux défis de la réalité historique, sociale et culturelle que nous vivons (cf. Camino, Fiche web n° : Fiche I, p. 3-4).
IV. « J’éprouve toujours une extrême consolation à voir une église de plus où réside le très saint sacrement. » (F 3, 10)
Thérèse se réjouit de chaque fondation, consciente d’avoir édifié une église de plus au service de la présence eucharistique et du ministère de l’oraison. (F 18, 5 ; 29, 27). Cette communauté choisie a son propre style de vie évangélique. Il faudra veiller à bien discerner chaque vocation.
A. Contexte
Fondation de Medina del Campo. Célébrer la première messe et installer le Très Saint Sacrement comme centre de la communauté était pour Thérèse l’acte liturgique fondamental pour la fondation canonique d’un monastère. Sa dévotion et son souci pour le Saint Sacrement fait nettement allusion au conflit luthérien.
B. Clefs de lecture
1. La vocation à l’oraison requiert du discernement, mais il ne faut pas craindre de « s’engager dans ce chemin » (F 4, 2-4).
2. L’imagination et la mélancolie, ennemies de l’intériorité (F 7)
3. L’essence de la parfaite oraison : « aimer beaucoup » (F 5, 2), « En se déterminant à agir et à souffrir, et en le faisant lorsque l’occasion s’en présente. » (F 5, 3) ; « non dans les recoins d’une solitude, c’est au milieu des occasions que se montre l’amour » (F 5, 15-16)
4. Vocation à la solitude et à l’intimité avec Lui : « Rien n’égale le bonheur que nous goûtons à nous voir seules » (F 31, 46)
5. Conseils aux prieures (F 18, 6-13) : « Le discernement est d’une grande importance pour gouverner » (F 18, 6 ; 19, 1). Conduire les sœurs au chemin de la Règle et des Constitutions avec charité, douceur dans les mortifications, en louant et en encourageant les vertus (F 8, 9), Il faut « aider progressivement chaque religieuse, selon la portée d’intelligence que Dieu lui a donnée et son degré d’avancement spirituel. » (F 18, 8)
C. Célébration
Oraison devant le Saint Sacrement. Texte pour s’y préparer : L’Humilité du Christ dans l’Eucharistie (F 3, 13) ; « la présence […] de Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, au très saint sacrement […] devrait être le sujet d’une de nos plus grandes joies. » (F 18, 5) au cœur de notre communauté et de notre vie.
Partage sur le texte biblique de la Samaritaine : l’eau vive et le contentement « d’être en sa compagnie » (F 31, 46).
V. « On devrait considérer aussi que l’on est soi-même fondement par rapport à ceux qui viendront. » (F 4, 6)
Thérèse rapporte les merveilles que Dieu a faîtes dans les premières vocations de ses Carmels. Ceux qui suivront doivent se souvenir de ces commencements, imiter leur exemple et comprendre qu’il ne s’agit pas seulement d’une chose du passé. Chaque carmélite est pierre et assise pour ceux qui viendront, et doit se souvenir que « à Dieu toutes les époques sont bonnes pour favoriser de grandes grâces ceux qui le servent avec fidélité. » (F 4, 5).
A. Contexte
Après le récit de la fondation de Medina del Campo, Thérèse conclut en exposant la situation idéale de la communauté, à la façon des actes des Apôtres : « Cependant nos religieuses gagnaient l’estime des habitants. On s’attachait beaucoup à elles, […] chacune ne songeait qu’aux moyens de mieux servir Notre-Seigneur. » (F 3, 18 ; 14, 8) Divers témoignages se succèdent au long des pages des Fondations : exemplarité et exigence de fidélité demandée aux générations futures.
B. Clefs de lecture
1. Garder mémoire des origines : « Tenez les yeux fixés sur la race des saints prophètes dont nous descendons. » (F 29, 33 ; 4 , 5-7 ; 9, 1 ; 14, 4-5).
2. Vivre le présent dans la fidélité : « Nous commençons maintenant. Efforçons-nous de commencer toujours et d’aller sans cesse de bien en mieux. » (F 29, 32 ; 16, 1 ; 30, 15 ; 28, 5).
3. Construire l’avenir : « Que chacune de celles qui nous succéderont se dise que c’est par elle que commence à refleurir cette première Règle de l’Ordre de la Vierge Notre Dame. » (F 27, 11).
C. Célébration
Appel, discernement et débat : Comment nous voyons-nous (communauté, groupe) et comment nous voient ceux de l’extérieur à la lumière de ces texte thérésiens ? Quelles sont les vertus que Thérèse considère dans les commencements ? et Que voulons-nous exprimer et transmettre aujourd’hui ?
Journée de retraite : Textes guides : « développer de si heureux commencements. » (F 20, 15) ; « Sa Majesté, lorsqu’on la laisse faire, se plaît extrêmement à toujours accroître ses œuvres. » (F 27, 11 ; 29, 33).
VI. « On reçut plusieurs novices, que Dieu avait lui-même choisies telles qu’il les fallait pour servir de fondement à semblable édifice. » (F 9, 1)
Tout au long de la chronique des fondations apparaissent, agrémentant et enrichissant les faits historiques, quelques portraits spirituels, mis là avec un évident souci pédagogique et à titre d’exemples. Appels à cette vocation singulière, vertus, souffrances, faits édifiants, grâce débordante de Dieu pour chaque âme choisie sont mis en lumière « afin que celles dont la ferveur est faible s’efforcent de les imiter, et que toutes ensemble nous bénissions le Seigneur, qui fait ainsi éclater sa magnificence en de faibles femmes. » (F 12, 10)
A. Contexte
Dans cette galerie de personnages, nous en trouvons de Valladolid, Duruelo, Tolède, Beas, Séville et Villanueva de la Jara. L’animateur de la rencontre sélectionnera dans le récit des fondations correspondantes les faits essentiels qui encadrent ces biographies spirituelles.
B. Clefs de lecture :
Ci-après, nous suggérons une perspective de lecture de chaque récit biographique, en reconnaissant qu’il y a de nombreuses possibilités de les aborder. Que de vertus, éloges du bien, leçons et conseils tire Thérèse de chacun de ces portraits !
1. Casilda de Padilla : vocation et opposition de la famille (F 10, 8-16).
2. Béatrice de l’Incarnation : vertus et mort exemplaire (F 12).
3. Sain Jean de la Croix et Antoine de Jésus : “une même façon de procéderˮ (F 13) « L’esprit que Dieu y avait répandu. » (F 14, 6).
4. Certaines religieuses : pauvreté, mortification et obéissance (F 16)
5. Catalina Godinez : conversion, foi et confiance en la promesse de Dieu (F 22)
6. Jérôme Gratien et Jean de Jésus : qualités humaines, piété mariale et désir du bien des âmes (F 23).
7. Béatrice de la Mère de Dieu : difficultés familiales et épreuves intérieures (F 26, 3ss).
8. Catalina de Cardona : solitude et abnégation évangélique (F 28, 21 et ss : cf. R 23)
C. Célébration
Partage sur la vocation : « Quand Dieu veut pour lui une âme, les créatures sont impuissantes à la lui ravir. » (F 10, 8).
Catéchèse : L’appel de Dieu au Carmel thérésien.
VII. « Je voudrais que Notre-Seigneur fasse savoir à tout le monde combien, dans ces fondations, le concours de ses créatures a été faible. C’est lui qui a tout conduit […] lui seul pouvait l’élever à la hauteur où nous les voyons aujourd’hui. » (F 13,7)
Thérèse rend témoignage à la puissance et la miséricorde Dieu au milieu des travaux et des obstacles rencontrés par chaque fondation : « La plupart de ces monastères n’ont pas été fondés par les hommes, mais par la puissante main de Dieu. » (F 27,11). Sa lecture théologale de l’histoire est toute imprégnée de la présence divine, rien n’échappe à la providence de Dieu.
A. Contexte
Nous sommes au tout commencement de Duruelo. Sans maison et sans autorisations des provinciaux, Thérèse ne peut que s’en remettre à Dieu : « Notre Seigneur qui m’avait donné l’essentiel, c’est-à-dire des religieux pour commencer la réforme, arrangea le reste…Que de choses apparemment impossibles j’ai vues au cours de ces négociations, et qu’il fut facile à Notre Seigneur d’aplanir les difficultés ! » (F 13,1-7)
B. Clefs de lecture
1. Étapes que l’on peut rencontrer avec chaque fondation :
- a) Thérèse est invitée à fonder un monastère ;
- b) Elle s’assure de l’opportunité d’une telle fondation, examine le lieu et les possibilités de subvenir aux besoins de la future communauté.
- c) Elle se soucie immédiatement d’obtenir les autorisations des autorités ecclésiastiques et civiles, recherche une maison à louer et un groupe de fondateurs ;
- d) Voyage et arrivée (généralement nocturne) ;
- e) Nettoyage et ornement du lieu et célébration de la messe aux premières heures du jour ;
- f) Recherche d’une maison définitive, puis, un peu plus tard, déménagement. Inauguration solennelle en présence du Très Saint Sacrement ;
- g) Installation de la clôture et mise en route du nouveau style de vie communautaire et de prière liturgique.
2. L’œuvre de Dieu.
Chaque fondation est « sa chose » (F 27, 11-12.16 ; 28, 18 ; 29, 5-6.24). Il en donne les moyens, Il désire chacune des fondations, Il se fait présent, aplanit les chemins, transforme les difficultés en possibles (F 31, 4.11.16.26.31.50).
Dans les grandes difficultés du chemin comme dans les maladies, Il donne des forces (F 18, 4 ; 24, 6 ; 25, 8 ; 27, 17-18 ; 29, 3). Dieu donne les épreuves avec tendresse (F 24, 11) ; Il n’abandonne pas « celui qui veut le servir » (F 27, 20).
C. Célébration
Étude et débat autour des textes : Comment lisons-nous notre propre histoire, les évènements, les difficultés qu’il nous est donné de vivre ?
VIII. « Efforçons-nous d’être de vraies Carmélites. Le voyage de la vie de ne sera pas long… » (F 16, 5)
Dans la vie de Thérèse son engagement dans l’histoire s’unit harmonieusement à l’espérance de la vie éternelle. Tout ce qu’elle dit est « un motif, non de suspendre notre marche, mais de l’accélérer, afin de contenter plus parfaitement notre Époux et de le trouver plus tôt, non de perdre cœur, mais de suivre avec un nouveau courage une route aussi escarpée que celle de cette vie. Si nous avançons avec humilité, nous parviendrons, moyennant la grâce de Dieu, à cette Jérusalem céleste, où tout ce que nous aurons souffert nous paraîtra peu de chose, ou plutôt ne nous paraîtra rien, auprès des biens dont nous jouirons. » (F 4, 4)
A. Contexte
Nous nous trouvons de nouveau face à un ensemble d’évènements édifiants, qui ont eu lieu dans le monastère de Tolède. L’un d’eux est le bonheur et la simplicité avec laquelle une sœur de la communauté accueille la mort. La vision que Thérèse a alors du Christ, veillant sur cette religieuse mourante constitue une promesse pour toutes les générations de carmélites. Un encouragement à s’engager totalement et fidèlement dans le bref voyage de la vie.
B. Clefs de lecture
1. Mort, jugement, ciel ou enfer ne s’éloignent jamais de l’horizon thérésien. Tout est fait pour servir et aimer toujours mieux, en imitant le Seigneur et en nous souvenant que nous n’avons pas de demeure ici-bas (F 14, 5) « Je vous en supplie, pour l’amour de Notre-Seigneur, rappelez-vous la rapidité avec laquelle que tout passe, […] La bataille durera peu, mes sœurs, et le terme est éternel » (F 29, 33 ; 12, 1 ; 27, 12 ; 28, 36).
2. Les évènements, les médiations, les décisions existentielles tissent jour après jour notre destin éternel. On peut employer cette clé pour lire les conseils de Thérèse aux pères de famille – aux parents – (F 10, 9-11 ; 11, 2 ; 20, 3) ; la vertu de l’obéissance (F prol. 1 ; 5, 5) ; la condamnation des considérations de lignage (F 15, 15-16).
C. Célébration
Débat : Comment relire et interpréter aujourd’hui théolo-giquement les événements relatés en F 6,18-21 ou en F 10, 1-5 ? Révision de vie : A quel point avons-nous et cultivons-nous le désir du ciel, la nécessité d’une purification, ou « transfi-guration » intérieure, la « simplicité » face à la mort ? (F 16, 4 ; 27, 12).
Conclusion
Dans Le livre de la vie Thérèse nous offrait son itinéraire personnel de grâce et sa réponse à l’appel de Dieu avec la fondation du premier Carmel. Dans le Chemin de Perfection elle nous confiait l’idéal de ce nouveau groupe au sein de l’Église, tout un manuel de vie et d’oraison thérésienne. Dans Les Fondations, c’est la chronique d’une aventure et une réponse collective : des femmes, priantes, pour l’Église, et en qui, et par qui Dieu fait des merveilles.
Comme nous avons pu le voir, la chronique des fondations n’est pas une chronique banale. Thérèse ne s’est pas contentée de mettre en ordre un ensemble de faits historiques. Histoire, pédagogie, mystagogie s’entrelacent de façon harmonieuse pour nous transmettre, avec l’amour, la chaleur et la fraîcheur du souvenir, la vie naissante de ses Carmels. Les aventures, les lieux, les noms, donnent au récit son réalisme historique. Mais Thérèse donne également des conseils, elle prie, elle met en garde, elle pèse les vertus, analyse les situations, loue Dieu, témoigne de sa grandeur et de sa miséricorde pour de pauvres petites femmes sans moyens, mais engagées « sans demi mesures » pour le monde et pour l’Église.
Nous disions en commençant que nous avions privilégié une lecture transversale. Notre propos était de faire une « lecture théologique » de l’histoire de ces Carmels, histoire que la Madre offre comme un exemple aux nouvelles générations. Nous avons voulu faire « passer par le cœur » toutes ces rencontres, ces lieux, ces personnes et ces vertus qu’elle nous a signalés comme un fondement, une base solide et éternelle. Ce sont nos « racines », toujours renaissantes et plantées profond dans la terre du Carmel pour la vie, l’amour et la fidélité au charisme thérésien de nous qui prenons la suite aujourd’hui.
Par ce que nous sommes, par ce que nous faisons aujourd’hui, puissions-nous témoigner et répéter les paroles mêmes de Thérèse de Jésus à propos de ce que nous avons reçu de « nos saints pères du passé » : « Voyez la main de Dieu » car « De quelque manière donc que vous l’envisagiez, vous reconnaîtrez que l’œuvre est de lui. Après cela, n’est pas raisonnable que la maintenions intacte, dît-il nous en coûter vie, honneur, repos ? » (F 27, 12)