Devenir des serviteurs de l’Amour (Ho. 23 dim TO - 10/09/23)

donnée au couvent d’Avon

Textes liturgiques (année A) : Ez 33, 7-9 ; Ps 94 (95) ; Rm 13, 8-10 ; Mt 18, 15-20

Là où il y a des êtres humains, il y a des conflits. Le mot « conflit » recouvre un large éventail de situations allant des petites tensions quasi invisibles au conflit ouvert, qu’on appelle généralement guerre.

Les conflits ont toujours existé dans les sociétés humaines. En Israël déjà, il existait des manières de faire pour apaiser les conflits. Les premiers chrétiens s’en sont inspirés, c’est ce dont témoigne l’Évangile du jour. Notre Dieu est un Dieu de paix. Jésus à sa naissance n’est-il pas appelé Prince de la paix ? La volonté de Dieu est d’assurer d’abord la paix entre les hommes, la paix qui permet la vie, protège la vie si fragile des humains.

Assurer la paix aussi lorsqu’un croyant se trompe, prend un mauvais chemin. Il est alors de la responsabilité de chacun de l’alerter, de l’aider à revenir sur le bon chemin. Dans la première lecture, du prophète Ezékiel, il est dit :Fils d’homme, je fais de toi un guetteur pour la maison d’Israël. Lorsque tu entendras une parole de ma bouche, tu les avertiras de ma part. (33,7) …si tu avertis le méchant d’abandonner sa conduite, et qu’il ne s’en détourne pas, lui mourra de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie. (33,9) Voilà qui est clair, notre devoir est de veiller à la santé, au sens large du terme, de nos frères et sœurs, de ne pas être indifférents à ce qu’ils vivent. Il ne s’agit pas de les juger, encore moins de les condamner, mais de les instruire des voies de Dieu.

Ainsi l’Évangile dit : Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. (v.15) S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins. (v.16) S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église … (v.17)
Précisons qu’il ne s’agit pas de faire la paix à n’importe quel prix, celui de la vérité. Faire la paix, oui ! S’y investir pleinement, mais pas au détriment de la vérité ! L’Évangile décrit une méthode progressive, qui suit un parcours ascendant, étape après étape. Ces paroles de Jésus mettent en place une médiation qui rend possible la formulation des griefs, la reconnaissance d’une faute, la possibilité d’une prise de conscience, le début d’une réconciliation.

Mais comment appliquer cette méthode et éviter les dangers inhérents, car les bons sentiments ne suffisent pas, on peut par maladresse aggraver la situation… La possibilité de l’échec est réelle, mais l’échec est-il définitif ? Jésus est venu pour sauver les pécheurs, les païens et les publicains ! Jésus ne se décourage pas devant des échecs apparents. Il nous invite à la prière. Si deux d’entre vous sur la terre se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, ils l’obtiendront de mon Père qui est aux cieux. (v.19)

La vraie prière rend humble. Nous ne sommes que des serviteurs de l’amour et de la vérité. Nous ne savons pas aimer comme Dieu aime et nous ne connaissons pas toute la vérité. Cette humilité, si elle est vraie, permet d’éviter de tomber dans l’excès, dans le risque d’une condamnation rapide, mal informée, le dialogue doit être respectueux, fondé sur une vraie écoute.

La correction fraternelle est un exercice difficile mais en même temps nécessaire. En la vivant, en la pratiquant dans l’humilité, l’écoute, la prière, en communauté, elle peut être salutaire pour celui ou celle qui s’est mis à l’écart, peut-être sans s’en rendre compte… Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel.

Cette parole doit nous conforter dans notre responsabilité ecclésiale, les uns par rapport aux autres, c’est une parole qui nous invite à collaborer à l’œuvre de Dieu. C’est aussi une parole de condamnation de l’individualisme excessif dont notre société est malade ! Outre l’humilité, l’écoute, la prière, vertus que nous avons à cultiver dans la pratique de la correction fraternelle, il y a enfin ce que Paul nous dit dans la deuxième lecture : Frères, n’ayez de dette envers personne, sauf celle de l’amour mutuel, car celui qui aime les autres a pleinement accompli la Loi. (Rm 13,8) L’amour ne fait rien de mal au prochain. Donc le plein accomplissement de la Loi, c’est l’amour. (Rm 13,10)

N’est-ce pas là le moyen ultime d’être écouté et de gagner son frère ? Que notre Seigneur Jésus Christ, présent quand deux ou trois sont réunis en son nom, nous donne la grâce de recevoir et de donner ce qui favorise la paix dans son Église et sur la terre.

Fr. Robert Arcas, ocd - (couvent d’Avon)
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